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Rappel utile des nouvelles règles résultant de la réforme du nom

Le 05 décembre 2024
Rappel utile des nouvelles règles résultant de la réforme du nom
La réforme du nom, un grand succès, mais une certaine complexité de mise en oeuvre...

La loi 2022-301 du 2 mars 2022 est entrée en vigueur le 1e juillet 2022.

Elle a apporté des modifications aux règles relatives au nom d’usage et créé une procédure simplifiée de changement de nom, dans les deux cas pour faciliter l’usage du nom du parent qui n’a pas transmis le sien.

 

Cette loi a fait l’objet de plusieurs circulaires dont la dernière, en date du 15 juin 2023 (JUS2309291C, Civ/03/23, abroge la précédente du 3 juin 2022 (JUSC2215808C) (v. égal. M.-P. Baudin-Maurin, infra p. 392).

Elle est consultable ici : https://www.justice.gouv.fr/circulaire-du-15-juin-2023-presentation-dispositions-issues-loi-ndeg-2022-301-du-2-mars-2022-relative-au-choix-du (AJ Famille 2023 p.36, Le choix du nom de famille : chiffres et nouvelle circulaire, Valérie Avena-Robardet[1])

 

-          Le nom d’usage (311-24-2)

Le nom d'usage est celui qui n'est pas inscrit à l'état civil, c’est un nom d’emprunt porté dans la vie quotidienne et qui peut être utilisé dans les rapports avec l'administration, sur les papiers d'identité accompagné de la mention « nom d’usage » et dans les relations avec les tiers, mais qui ne figure pas à l’état civil et n’est pas transmis.

C’est, par exemple, le nom du mari porté par l’épouse, mais qui ne figure pas sur son état civil.

Jusqu’à 2022 et s’agissant des enfants, il ne pouvait que s’adjoindre à titre d'usage et non se substituer au nom de famille (article 43 de la loi 85-1372 du 23 décembre 1985).

Il n’était par ailleurs codifié que concernant les époux (article 225-1), mais pas concernant les enfants : la situation des parents séparés n’était en effet prévue que par l’article 43 de la loi du 23 décembre 1985, qui permettait aux titulaires de l’autorité parentale d’adjoindre au nom de l’enfant et à titre d’usage le nom de celui qui ne lui avait pas transmis, avec saisine du jaf en l’absence d’accord.

La loi du 2 mars 2022 a désormais codifié les dispositions relatives au nom d’usage à raison de la filiation, en distinguant entre les enfants majeurs et les enfants mineurs, par l'insertion dans le code civil d'un article 311-24-2 en remplacement et en complément de l’article 43 de la loi du 23 décembre 1985.

Ø  Cet article prévoit la possibilité pour tout majeur de porter, à titre d’usage, le nom de son choix entre celui qui lui a été transmis et celui de ses parents qui ne lui a pas transmis le sien : « Toute personne majeure peut porter, à titre d'usage, l'un des noms prévus aux premier et dernier alinéas de l'article 311-21. »

Ø  S’agissant de l’enfant mineur, l’adjonction ou le choix du nom d’usage intervient d’un commun accord par les parents exerçant l’autorité parentale, ou par le parent l’exerçant seul (avant, il s’agissait de tout titulaire de l’autorité parentale[2], même non parent) : « A l'égard des enfants mineurs, cette faculté est mise en œuvre par les deux parents exerçant l'autorité parentale ou par le parent exerçant seul l'autorité parentale.

En outre, le parent qui n'a pas transmis son nom de famille peut adjoindre celui-ci, à titre d'usage, au nom de l'enfant mineur. Cette adjonction se fait dans la limite du premier nom de famille de chacun des parents. Il en informe préalablement et en temps utile l'autre parent exerçant l'autorité parentale. Ce dernier peut, en cas de désaccord, saisir le juge aux affaires familiales, qui statue selon ce qu'exige l'intérêt de l'enfant. »

Les parents peuvent librement choisir entre adjonction, substitution du nom de l’autre parent à titre d’usage, ou interversion de l’ordre des noms.

Leur accord n’est encadré par aucun formalisme, mais il sera nécessaire d’en justifier auprès de l’officier d’Etat civil et la circulaire propose un modèle d’accord parental à cette fin.

En cas de désaccord, c'est le juge aux affaires familiales qui sera saisi en application des dispositions de l'article 373-2-6 pour statuer sur le nom d'usage de l'enfant.

Par exception et pour permettre au parent titulaire de l’autorité parentale qui n’a pas transmis son nom de le faire en tout état de cause, la loi a instauré le droit, au profit du parent qui n’a pas transmis son nom de famille, de l’adjoindre en deuxième position, à titre d’usage au nom de l’enfant, dans la limite du premier nom de famille de chacun des parents.

Ici, seule l’adjonction sera possible et la substitution ou l’inversion sont impossibles.

L’article impose toutefois une information préalable et en temps utile l’autre parent, c’est-à-dire avant que l’enfant ne fasse usage de son nouveau nom. Il s’agit de laisser à l’autre parent la possibilité de faire connaître son opposition ou de saisir le jaf, lequel statuera en fonction de l’intérêt de l’enfant.

Là encore, l’information préalable de l’autre parent n’est pas encadrée par un formalisme particulier, cependant il est nécessaire de s’en réserver la preuve, sauf à quoi les administrations refuseront de procéder à l’adjonction du nom.

La circulaire précise que l'opposition de l'autre parent et la saisine du juge aux affaires familiales n'empêchent pas le parent d'adjoindre son nom, à titre d'usage, à celui de son enfant (p. 11).

Le consentement de l’enfant de plus de 13 ans est requis.

 

Ø  La loi complète par ailleurs l'article 225-1, qui a codifié l'usage du nom d'un époux par l'autre, par la précision "dans la limite d'un nom de famille pour chacun d'eux" (pour éviter qu'on s'appelle Soupaloignon e jamon e crouton, pour ceux qui ont des lettres). Attention, toutefois, les noms composés seront adjoints en intégralité :

Ex : monsieur Belier-Gorce et Madame Martin-Aubert pourront porter les 4 noms, en revanche monsieur Belier Gorce et Madame Martin Aubert ne pourront porter que 2 noms sur les 4. Idem pour les enfants.

 

-          Le nom de famille

 

Ø  La procédure simplifiée de changement de nom de famille de l’article 63-3-1

 

Le nom de famille est celui qui a été transmis selon les règles propres à la filiation et qui figure à l’état civil. Il identifie la personne jusqu’à sa mort et se transmet à sa descendance. Jusqu'à la loi de mars 2022, il ne pouvait être modifié que par une procédure complexe et il n'était pas possible d'adjoindre ou de substituer à son nom à l'état civil celui de ses parents qui ne le lui avait pas transmis.

 

La loi de 2022 a simplifié la procédure de changement du nom de famille, en permettant au majeur d’opter pour le nom de l’ascendant de son choix, via une simple déclaration devant l’officier de l’état civil dépositaire de son acte de naissance ou de son lieu de résidence, dont les modalités sont prévues par l’article 61-3-1 du Code Civil.

Cette procédure n’est pas ouverte aux parents titulaires de l’autorité parentale concernant leurs enfants mineurs, dont le changement de nom reste soumis à la procédure de l’article 61 (décret) et le choix du nom est circonscrit aux noms de la parentèle.

Ce changement de nom s’opère par simple déclaration, il n’est soumis à aucune formalité préalable de publicité ou d’information et il est de droit, de telle sorte que l’officier d’état civil n’a pas à vérifier le caractère légitime de la demande.

La demande peut être transmise par le demandeur en personne ou par son avocat, accompagnée des pièces utiles et un formulaire CERFA est disponible sur le site Service-public.fr

Le majeur protégé n’a pas besoin d’être représenté par son tuteur ou par son curateur et peut former cette demande elle-même, et il n’a pas à justifier de l’accord ou de l’information de son tuteur ou de son curateur.

Il n’est en revanche possible d’y recourir qu’une seule fois, mais cela ne fait pas obstacle à un changement de nom par décret suivant les dispositions de l’article 61 du Cde Civil. De la même façon, le fait d’avoir pu changer de nom par décret ne fait pas obstacle à la procédure simplifiée de changement de nom devant l’officier de l’état civil.

 

A réception de la demande, l’officier d’état civil ne peut que vérifier sa compétence, étant précisé qu’en sus de l’officier d’état civil dépositaire de l’acte et de l’officier d’état civil du lieu de résidence, la demande peut être formée auprès du service central d’état civil pour les personnes nées à l’étranger et à l’ofpra pour ceux qui en relèvent. Elle peut également être formée directement auprès du procureur de la République du lieu de naissance de l’intéressé, dans les hypothèses de carence de l’officier de l’état civil saisi initialement de la demande (61-3-1 dernier alinéa)

Le demandeur doit, si la saisine est fondée sur son lieu de résidence justifier de celle-ci par tout moyen (quittance quelconque, étant rappelé que l’avis d’imposition vaut justificatif de résidence), s’il est hébergé il pourra transmettre une attestation d’hébergement.

Il doit justifier de son identité et de sa filiation, par la production de son acte de naissance datant de moins de 3 mois, avec des dispositions spécifiques pour les ressortissants étrangers, fonction du système d’état civil étranger. Il sera rappelé que l’officier d’état civil a accès à COMEDEC, de même que les notaires, mais pas les avocats. Le demandeur doit également justifier des conséquences du changement de nom sur les autres personnes intéressées par celui-ci, comme ses enfants.

Le demandeur doit encore confirmer, en personne, sa volonté de changer de nom devant l’officier d’état civil saisi un mois au minimum après la réception de la demande. Il est convoqué à cette fin par l’officier d’état civil ; A défaut de se présenter, la demande est archivée ; Si le demandeur se présente, l’officier d’état civil le mentionne sur la demande et procède à la consignation du changement de nom dans le registre de l’état civil en cours. Pour les demandes déposées à l’étranger, le changement de nom est consigné par les officiers de l’état civil du service central d’état civil. L’officier d’état civil appose la mention du changement de nom sur l’acte de naissance s’il le détient, et sur les actes corrélatifs s’il les détient également (actes de mariage, acte de naissance de l’époux ou du partenaire, actes de naissance des enfants), s’il ne les détient pas, il adresse un avis de mention aux officiers de l’état civil détenteurs de ces derniers aux fins de mise à jour et l’adresse à l’insee aux fins de mise  jour du répertoire national des personnes physiques. 

Le demandeur est informé de cette consignation par l’officier d’état civil.

Ce choix de nom n’a pas d’incidence sur les noms de ses frères et sœurs du majeur, pour ceux qui sont concernés par une déclaration conjointe de choix du nom conditionnant le nom de la fratrie (article 311-21 CC).

Il en a en revanche pour les enfants du demandeur, majeurs ou mineurs, dès lors qu’ils portent le nom de ce dernier et que les effets du changement de nom leur sont étendus. Cette extension intervient de plein droit lorsque les enfants ont moins de 13 ans, elle est soumise au consentement personnel de l’enfant de plus de 13 ans et de l’enfant majeur, il doit être mentionné dans la demande. S’il n’est pas intervenu au jour de la confirmation de la demande de changement de nom, les enfants de plus de 13 ans ou majeurs ne pourront plus bénéficier de l’effet de ce changement de nom.

Si le nom de l'enfant n'est pas modifié, seul le nom de son parent sera modifié sur son état civil. La déclaration conjointe de choix de nom sera adaptée au nouveau nom des enfants de moins de 13 ans ou de ceux de plus de 13 ans y ayant consenti.

Quid de l'impact sur le nom du conjoint ?

La circulaire n'y répond pas, sous réserve de l'actualisation de son acte de mariage et de son acte de naissance, avec le nouveau nom. Dès lors qu'il a l'usage du nom de son conjoint et que le nom de ce dernier change, il semble qu'il perde l'usage de l'ancien nom et qu'il n'ait que l'usage du nouveau. De même pour celui qui a conservé l'usage du nom de son époux, qui n'a donc que l'usage du nouveau nom, selon les termes de la décision, sauf si elle mentionne expressément l'ancien nom. Il faut donc expressément mentionner l'usage du nom X, et non pas l'usage du "nom du conjoint", car l'un des moyens de forcer son conjoint à mettre fin à cet usage pourrait être pour l'ex époux de modifier son nom à l'état civil au profit de celui qui ne lui a pas été transmis, suivant la procédure accélérée de changement de nom, puis de prendre, à titre d'usage, celui de l'autre parent (et donc son ancien nom), de sorte qu'il ne changerait pas de nom, contrairement à l'autre...

Le procureur de la République est saisi sans délai en cas de difficulté, notamment s’il a un doute quant à la filiation du demandeur avec le parent dont il demande à porter le nom. Si le procureur estime que les conditions sont remplies, il ordonne à l’officier d’état civil d’inviter le demandeur à venir confirmer sa demande puis de réaliser la consignation.

Si le procureur estime que les conditions ne sont pas remplies, il avis le demandeur de son opposition par tout moyen et transmet copie de sa décision à l’officier d’état civil.  

La contestation de l’opposition du procureur de la République s’effectue devant le tribunal judiciaire dont dépend le parquet auteur de la décision d’opposition, dans les conditions des articles 750 et suivants du code de procédure civile.

Cette procédure simplifiée de changement de nom s’ajoute à celles déjà ouvertes de manière très restreinte et via une procédure complexe (qui consiste, après publication au journal officiel et dans un journal d'annonces légales en la saisine du ministre de la justice précisant le nom demandé et l'intérêt légitime, qui dure près de deux ans et qui se concrétise par la publication d'un décret de changement de nom. Elle concerne environ 3.000 personnes par an et la jurisprudence est très restrictive, même si le conseil d'état a assoupli les conditions en 2014) par les articles 61 et suivants du code civil, en ajoutant un alinéa comme suit à l'article 61-3-1 :« Toute personne majeure peut demander à l’officier de l’état civil de son lieu de résidence ou dépositaire de son acte de naissance son changement de nom, par inversion de l’ordre des noms choisi par les parents, par substitution ou adjonction à son propre nom du nom de famille du parent qui ne lui a pas transmis le sien, dans l’ordre choisi par elle, dans la limite d’un nom de famille pour chacun des parents. Sans préjudice de l’article 61, ce choix ne peut être fait qu’une seule fois. »


2° Après le mot : « fixées », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : « au présent article s’étend de plein droit aux enfants du bénéficiaire lorsqu’ils sont âgés de moins de treize ans et sous réserve de leur consentement dans le cas contraire. »

 

Ø  Le nouvel article 380-1 du Code Civil, également réformé par la loi du 2 mars 2022, permet à la juridiction civile ou pénale saisie, lorsqu’elle prononce le retrait total de l’autorité parentale, de statuer sur le changement de nom de l’enfant, sous réserve du consentement personnel de ce dernier s’il est âgé de plus de 13 ans (article 380-1 du Code civil).

Le juge qui prononce le retrait total de l’autorité parentale peut statuer sur le changement de nom dans le cas où le mineur souhaite changer de nom pour prendre l’un des noms qui lui sont ouverts en application des dispositions de l’article 311-21 du Code Civil.

La demande est formée au nom du mineur par l’autre parent titulaire de l’autorité parentale non visé par la procédure de retrait de l’autorité parentale, soit par un administrateur ad hoc dans l’hypothèse où ce parent serait défaillant.

Lorsque l’enfant est âgé de plus de 13 ans, son consentement est requis.

« En prononçant le retrait total de l'autorité parentale, la juridiction saisie peut statuer sur le changement de nom de l'enfant, sous réserve du consentement personnel de ce dernier s'il est âgé de plus de treize ans. »

Entre le 1e août 2022 et le 31 décembre 2023, 144.100 personnes ont changé de nom, toutes procédures confondues, soit 3 fois plus qu’auparavant. 97.500 personnes ont opté pour une substitution de nom, 30.700 ont opté pour l’ajout et 5.500 pour la suppression d’un des deux noms d’origine. 53% des demandeurs ont entre 18 et 29 ans, et 23% entre 30 et 39 ans, un quart des demandes touche des enfants de moins de 13 ans, impactés par le choix de leur parent.